« Tous les collaborateurs doivent être engagés dans ce projet !». L’injonction peut paraître logique car si un salarié s’engage dans les projets de son entreprise, c’est qu’il adhère à la stratégie. Les conséquences évidentes seraient alors : motivation, collaboration et productivité. En théorie, c’est un idéal vers lequel souhaitent tendre toutes les entreprises…et pourtant nous constatons que le manque d’engagement des salariés est un véritable problème de fond. Une question se pose alors : est-il possible d’imposer un engagement à quelqu’un d’autre que soi-même ?
L’engagement du salarié
Une étude a été réalisée, auprès d’un panel de 1 016 managers de proximité, par l’Observatoire de l’engagement (oui, oui, ça existe…), la clarification du terme engagement en était la première phase.
« L’engagement au travail est l’énergie que consacrent les salariés à la réussite des projets communs de l’entreprise. Il se traduit par un état d’esprit et des initiatives qui témoignent de leur appropriation de la stratégie et des enjeux. »
On apprend, dans cette étude, qu’en premier lieu c’est la reconnaissance du travail effectué qui est une clé à l’engagement du salarié (46%) devant le développement de l’autonomie (35%). A l’inverse, les principaux freins sont : la résistance au changement (44%), le manque de moyens (42%) et le manque de perspective d’évolution (41%).
Selon ces résultats, la reconnaissance du travail accompli serait donc un élément prépondérant dans l’engagement du salarié. Mais un engagement n’est-il pas un choix personnel fait par un individu dans un contexte donné ? La résistance au changement comme principal frein ? Mais s’engager signifie « choisir » alors comment imposer à quelqu’un un « engagement » ? L’engagement ne permet-il pas d’affirmer sa responsabilité mais aussi sa liberté face à soi-même et aux autres ?
Il est vrai que la Société nous conditionne à devenir de plus en plus matérialiste et individualiste, de moins en moins solidaire et concerné par le sort des «autres», à renier l’interrelation des êtres vivants dans ce grand Tout. Dans un tel contexte, pourquoi s’engager alors que la Société nous porte de ses chants de sirène : argent facile, surconsommation et logique court-termiste ; le tout relayé par les médias dans une course à la désinformation. En substance, nous comprenons ces résultats, nous y sommes confrontés tous les jours mais il est important de revenir à la définition première et simple de la notion d’engagement : « action de se lier par une promesse ».
L’engagement est un acte noble
Nous vous invitons à prendre de la hauteur, à bouger le curseur de vos certitudes car la logique implacable de ce que représente l’engagement au travail pourrait bien être ébranlée.
S’engager est une décision essentielle dans la vie d’un individu : c’est le soldat qui décide de défendre les valeurs de son pays en risquant sa vie alors qu’il n’est pas contraint de le faire; c’est le personnel soignant qui va consacrer la plus grande partie de sa vie à soigner les malades et à les accompagner même parfois jusqu’à leur mort ; c’est l’humanitaire qui va défendre la dignité humaine ; c’est aussi chaque personne qui s’engage à devenir parent et à inculquer des valeurs fortes d’ouverture, de tolérance et d’espérance à ses enfants… Toutes ces personnes s’engagent parce qu’elles l’ont décidé.
Cependant, aujourd’hui, nous constatons une emprise bureaucratique qui prévaut dans le fonctionnement de nos sociétés occidentales. Les processus administratifs et juridiques prennent le pas sur la notion « noble » de ce que peut signifier l’engagement. Quasi-systématiquement les termes « professionnalisation » et « contractualisation » sont liés à la notion d’engagement.
L’engagement se réduit alors à un acte juridique entre parties prenantes, à un ensemble d’obligations en contrepartie d’un paiement ou d’un salaire. Subsistent alors les règles sur l’engagement mais plus vraiment l’acte en lui-même.
Dans les entreprises, nous confondons de plus en plus le fait d’être professionnel avec cette notion d’engagement, c’est-à-dire à ce surplus d’âme incarné au travers d’actions tournées vers les autres, pour un mieux-être collectif. La première condition pour susciter l’engagement est d’en être l’exemple incarné en tant que manager. Et cette exemplarité doit aussi être présente au plus haut niveau de la hiérarchie. La deuxième condition est que l’environnement dans lequel évolue le collaborateur favorise sa liberté, son autonomie et ses prises de décision. C’est un écosystème qu’il s’agit de laisser évoluer tout en veillant à ses besoins fondamentaux.
Finalement, s’engager c’est « promettre » que notre humanité sera toujours plus forte que l’individualisme et l’intolérance mais c’est aussi porter un message d’espoir pour les générations futures.