A la veille des grandes vacances d’été, nous vous proposons le portrait d’un ancien nageur de haut-niveau devenu vigie-requin. Guillaume se définit comme un métis réunionnais, né d’un père métro et d’une mère créole, amoureux de son île et par-dessus tout de la mer !
Guillaume, parlez-nous de votre parcours sportif
Lorsque je suis rentré au collège, mon père me parlait du « sport des Dieux », le triathlon. Alors je m’y suis mis et j’ai été champion de la Réunion de ma catégorie. L’année suivante j’ai eu des problèmes à un genou et j’ai dû ralentir mes entraînements jusqu’à faire le choix de me consacrer uniquement à la natation. Je me suis alors beaucoup entraîné et lorsque je suis parti en métropole pour mon année de 4è, j’ai fait un podium aux championnats de France. Je n’ai, malheureusement, pas remporté de titre national alors que je faisais les meilleurs temps nationaux tout au long de la saison. Je n’arrivais pas à être aussi performant lors du championnat de France…
Malgré tout, j’étais alors au lycée, j’ai eu la chance d’intégrer le Pôle de haut-niveau d’Antibes et de côtoyer l’élite française. Mais à ce moment-là, j’attrape la mononucléose et suis constamment épuisé. Ma saison est compromise et ma relation avec les coachs se dégrade. Je quitte le Pôle et rentre en Bretagne dans mon ancien club de natation.
Qu’est–ce que cette expérience au plus haut-niveau vous a apporté ?
Tout d’abord de la maturité car j’ai dû quitter le cocon familial pour me retrouver en internat à l’autre bout de la France. Ensuite, j’ai appris la rigueur, la discipline, aussi à me faire mal. Je me dépassais à chaque entraînement et je sais désormais comment repousser mes limites.
J’ai adoré cette expérience du haut-niveau, mais pour être sincère, je sais aussi qu’il est extrêmement difficile de gagner de l’argent en tant que sportif… Il fallait donc que je réfléchisse à un autre moyen de gagner ma vie.
Qu’avez-vous décidé de faire alors ?
J’avais déjà fait un bac pro « Technicien du bâtiment ». Non pas que ces études me passionnaient mais il me fallait un certain niveau scolaire pour entrer au Pôle d’Antibes. Ensuite, je me suis orienté vers des études en STAPS (Sciences et techniques des Activités Physiques et Sportives NDLR) mais je me suis rendu compte que je n’étais pas fait pour des études longues.
J’ai eu envie de vivre une grande aventure alors je suis parti en Australie. J’ai travaillé dans des fermes : je ramassais des bananes dans le Queensland… Ça peut faire sourire comme ça mais j’en garde un excellent souvenir, si bien que j’y suis resté plus longtemps que prévu et j’ai pu parfaire mon anglais.
Six mois après, je suis rentré en France en sachant ce que je voulais faire dans ma vie : je voulais devenir Maître-Nageur Sauveteur (MNS). Lionel Bion, entraîneur à l’ASEC, m’avait vu évoluer en métropole et je savais qu’il était à La Réunion alors je l’ai contacté pour avoir ses conseils.
C’est à ce moment que vous êtes rentré à la Réunion ?
Oui car Lionel m’a dit qu’il était d’accord pour me prendre en stage dans le cadre d’un BPJEPS AAN (Activités Aquatiques et Natation). Je me suis donc inscrit au CREPS à La Réunion pour suivre ce cursus. Je suivais des cours et travaillais aussi sur les plateaux des différentes piscines de St Paul.
J’ai obtenu mon diplôme en 2018 mais il n’y avait pas de poste disponible à ce moment-là.
J’ai donc attendu et travaillé à Intersport Savannah pendant 1 mois et demi. Ensuite, je me suis dit que j’allais faire une « saison » en station de sport d’hiver en métropole pour gagner de l’argent. J’avais alors tout planifié et peu de temps avant mon départ, la mairie de St Paul me propose un poste de contractuel. Je pars donc deux semaines en métropole en vacances et reviens prendre mon poste.
La mairie me proposait un contrat de 6 mois et là tout s’enchaîne car la Ligue Régionale de Surf recrutait des vigie-requins. J’ai toujours voulu travailler sur les plages car je suis un amoureux de la mer. Depuis novembre 2018, je travaille donc comme vigie-requin pour la LRS.
C’est quoi être «vigie-requin » ?
Le dispositif VRR (Vigies Requins Renforcé) a été mis en place par la Ligue Réunionnaise de Surf (LRS) et la Région Réunion. Il s’agit d’établir un protocole d’observation des spots de surf afin de détecter la présence de requins et d’alerter les pratiquants. Ce dispositif est réservé au Pôle Espoir et aux licenciés de la FFS (Fédération française de Surf).
Concrètement, une équipe choisit un spot de surf selon des critères très précis. Ensuite tout le dispositif se met en place. Il y a des équipes en mer et d’autres à terre. Un bateau équipé de caméras sonde les fonds marins au large, les images sont minutieusement observées par les équipes, sur le bateau mais aussi sous la tente dite « techno » sur la plage.
En second lieu, des bouées sont mises à l’eau pour délimiter la zone sécurisée. Là se trouvent des Vigies Requins, immergés et nageant sur chaque côté de la zone sécurisée, armés de harpons. Les équipes se relayent tout au long de la journée. Pour ma part, je suis régulièrement parmi ces plongeurs.
C’est un métier dangereux, qu’est-ce qui vous attire ?
J’adore la mer et je ne veux pas que le surf disparaisse de notre île ! J’apprends énormément avec mes collègues qui sont tous passionnés par l’océan. La dimension très physique de ce métier me convient bien et puis je plonge à l’œil alors que certains payent pour ça ! (rires)
Plus sérieusement, l’ambiance entre collègues est exceptionnelle. Nous faisons preuve de solidarité entre nous et partageons le souhait de sauver le surf réunionnais.
Il faut d’ailleurs préciser, qu’à ce jour, aucune attaque n’a été recensée lorsque le dispositif est en place.
Quel conseil donneriez-vous aux surfeurs ?
Je leur dirais qu’il faut que le surf continue à la Réunion mais pas au prix du sacrifice de vies humaines. Aujourd’hui, il y a 500 fois plus de risques d’attaques à La Réunion qu’en Australie. Il est possible de surfer au sein du dispositif et de se faire plaisir à moindre risque.
Si vous voyez une belle « session » mais que les conditions météo ne sont pas optimales ou que l’eau est trouble, n’y allez pas ! Dites-vous que la prochaine session sera peut-être meilleure et les conditions aussi !
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Intégrez le dispositif VRR : https://www.surfingreunion.com/vrr/